L'appel du large

Les aventures d'une petite bretonne expatriée en Autriche

Premières semaines : acclimatation, fatigue et découvertes

Vous aimez bien quand je raconte ma vie ? J’espère, parce que là j’ai plein de choses à vous raconter. Mon dernier article était plus général, mais là c’est le retour du storytelling. Cela fait maintenant 17 jours que je suis en Autriche, j’ai commencé à travailler, alors il s’est passé plein de choses depuis mon installation (depuis ce post).

Mes débuts au travail

Et oui, j’ai commencé à travailler. Je suis officiellement dans la vie active, j’ai mis à jour mon profil Linkedin et tout. Mais en vrai, c’est comment ? A la fois très dur, très cool, et très enrichissant. Je m’explique.

/!\ Avant toute chose, petit disclaimer ! Ce que je décris ici c’est mon expérience dans mon entreprise. Je vous encourage à ne pas faire de généralités sur le travail en Autriche, les règles en entreprise ou autre à partir de ce que je dis : en France, une petite entreprise en campagne ne va pas du tout fonctionner comme une multinationale à Paris, et ici c’est pareil. Donc c’est mon point de vue (qui plus est de petite jeune arrivée depuis 2 semaines et qui comprend pas tout ce qui se passe) et absolument pas une réalité absolue. Poursuivons.

Donc, mes débuts au travail. Quand j’étais allée en octobre pour découvrir un peu le terrain, j’avais déjà pu rencontrer mes futurs collègues et le chef, et ils m’avaient tous fait très bonne impression. Ça s’est confirmé pour ma vraie arrivée : j’ai été bien accueillie, tout le monde a été très sympa avec moi, j’ai rapidement été intégrée dans les réunions sur les projets en cours. L’ambiance dans l’entreprise me paraît très saine et plutôt décontractée. Il y a une petite vingtaine de salariés, tout le monde se tutoie, on m’a proposé plusieurs fois des gâteaux, des bonbons à l’eucalyptus ou du café. Un des deux grands managers porte toujours une veste de jogging adidas, l’autre porte des chaussons à son bureau. Les dames avec qui j’ai pu travailler dans la prod ont aussi été adorables avec moi. Le seul truc qui me plait pas trop c’est que parmi les cadres, chacun mange à son bureau, il y a une salle de pause pour les opérateurs mais on ne l’utilise pas. Pas cool pour faire connaissance du coup. Surtout que j’ai mon propre bureau, ce qui me gène un peu parce que c’est un privilège de malade (à part moi, seul le chef a son bureau à lui tout seul), et du coup je suis un peu isolée des autres managers. Mais bon, le gros avantage c’est que je suis tranquille pour travailler.

A ceux qui pensent « mais c’est sûrement pour le covid que chacun mange à son bureau non ? », je précise que non, c’est juste leur habitude. Et les mesures covid, je les trouve extrêmement souples ici : pas de masque au travail, distanciation pas toujours respectée. On m’a aussi serré la main une fois ou deux. Ok les bureaux sont grands et on aère de temps en temps malgré le froid, il y a des affiches sur les gestes barrière et du gel hydroalcoolique aux bureaux, mais bon à part ça… Je n’ai peut-être pas été mise au courant de tout, mais le contraste avec la France est tout de même grand et même si je ne vais pas me plaindre de ne pas devoir porter de masque au travail, ça me surprend voire me dérange un peu.

Bref. En arrivant le premier jour, j’ai parlé allemand avec tout le monde direct, même si ils m’avaient dit en octobre que dans les bureaux je pouvais parler anglais. Mais je veux m’intégrer le plus vite possible, alors ça passe par maîtriser la langue rapidement. Et pour ça pas de secret, il faut travailler. Par contre, c’est vraiment fatigant. Les mots ne me viennent pas naturellement, je fais pas mal d’erreurs, et si je ne suis pas concentrée sur ce qu’on me dit je suis incapable de comprendre (surtout avec l’accent autrichien de mes collègues). Donc c’est beaucoup d’efforts à faire constamment, et à la fin de la journée je suis souvent vraiment fatiguée. En plus, je me lève tôt et le temps de m’adapter à ce nouveau rythme je suis en dette de sommeil. Ici, les cadres commencent leur journée à 7h, la production à 6h : j’ai le droit d’arriver plus tard mais avec mon temps de trajet les journées sont longues.

Sinon, globalement je me plais dans mon travail et mon entreprise, même si deux semaines c’est un peu prématuré pour faire un vrai jugement : je n’ai pas tout compris du fonctionnement de l’entreprise, je ne connais pas bien tout le monde, et je n’ai pas encore de vraies missions, pour le moment je découvre les procédés de fabrication, les technologies utilisées et les projets en cours. Mais je trouve ça hyper intéressant et j’apprends plein de choses, entre l’allemand et tout ce qui touche au photovoltaïque. Donc ultra enrichissant, et si je profite au maximum de cette période d’adaptation qu’on me laisse j’ai quand-même hâte d’avoir des vrais projets pour pouvoir apporter quelque chose à l’entreprise et leur prouver qu’ils ont eu raison de me faire confiance pour ce job. En tout cas pour le moment je suis contente de me lever le matin, et ça c’est le plus important.

La problématique du transport

Avec mes débuts au travail, s’est posée la question du transport. J’habite à Linz, mais je travaille dans une autre ville. J’ai fait le choix d’avoir un temps de trajet plus long pour pouvoir habiter en coloc, rencontrer du monde et avoir une vie le weekend. Mais du coup ça demande une certaine organisation. Pour mon premier jour, c’est mon chef, qui habite Linz aussi, qui a fait le taxi pour moi et est venu me chercher juste devant mon immeuble. La classe, mais du coup il a fallu que je fasse un peu la conversation en allemand. Je préfère être autonome. Et dès le lendemain, j’ai été autonome et j’ai emmené mon vélo dans le train pour le laisser dans la ville où est située l’entreprise (plus pratique et moins cher que de le trimballer tous les jours). Mon trajet, c’est donc 15-20 minutes à pied (qui se transformeront plus tard en 5-10 minutes de vélo) pour aller à la gare, puis 30 minutes de train, puis re 10 bonnes minutes de vélo, ce qui fait environ une heure au total.

Autre contrainte : le train, ça se paye. Je sais pas trop si en Autriche l’employeur est sensé payer les abonnements de transport en commun ou pas, mais pour moi en tout cas non. En même temps, j’ai un statut particulier, ce n’est pas mon employeur qui me paie mais Business France. Et comme payer 30€ de train par jour pour aller travailler, ça va bien 5 minutes, j’ai rapidement acheté une Österreichcard, autrement dit une carte qui donne l’accès illimité au train pour l’opérateur national public, ÖBB (il y a aussi une compagnie de train privée, Westbahn). Pour environ 96€ par mois (tarif jeune), je peux donc prendre le train autant que je veux. Ça me paraît être un tarif largement raisonnable : un aller-retour de Linz à l’aéroport de Vienne, ça fait 90€, alors la carte est vite rentabilisée si on prend le train régulièrement.

Dernière contrainte : le vélo en lui-même. J’ai du coup dû m’en acheter un deuxième pour en avoir un à Linz, toujours via le site de petites annonces, mais n’ayant pas de deuxième antivol j’en ai acheté un en ligne pour me le faire livrer. Et vous vous souvenez de mes photos de neige ? Depuis que je suis arrivée, ici il ne pleut pas, il neige. Celle qui est tombée le jour de mon arrivée n’a pas fondu, je n’ai pas encore vu l’herbe du jardin de mon immeuble (edit : depuis deux jours il fait un peu plus chaud, alors ça y est ça commence à fondre ! Il a fallu quand-même deux semaines…). Alors oui, les routes sont déneigées, et la plupart du temps il n’y a pas de soucis. Mais j’ai aussi fait mon baptême de vélo sur et sous la neige.

Ça vous paraît hyper dangereux ? Oui, il faut faire attention, rouler doucement et ne pas faire de manœuvres brusques. Quand c’est trop dangereux, je mets pied à terre. Mais sinon, ça se fait. Et puis ici, ils ne se posent pas la question. Au travail, personne ne s’est vraiment inquiété du fait que j’allais devoir faire le trajet sous la neige, pour eux c’est pas quelque chose d’exceptionnel.

La suite de mon installation

Dans mon article précédent sur mon installation, je vous avais laissé alors que je commençais tout doucement à me créer des repères dans cette ville. Et sur ce point, c’est de mieux en mieux : après avoir testé pas moins de 7 supermarchés différents, je sais à peu près où acheter quoi, et j’ai une idée de comment je peux organiser mes courses dans la semaine. Ça, c’est pour moi une des grosses difficultés d’une vie d’expat au début, l’alimentation c’est ultra important, et ici je n’ai retrouvé que très peu de produits de marques qu’on peut trouver en France. Et ici, les supermarchés sont globalement plus spécialisés qu’en France, du moins j’en ai vu aucun avec un rayon livres ou fournitures scolaires. Alors le mix que j’ai trouvé c’est : Billa (supermarché classique) pour les produits classiques, le SPAR de la gare pour des courses express en milieu de semaine, le magasin bio pour les fruits, légumes et plats végétariens type falafels, et enfin dm pour quelques autres produits. A part le SPAR ils sont tous situés dans la même zone commerciale pas loin de chez moi, donc c’est gérable.

En termes de confort matériel, j’ai pu lors de mon deuxième weekend à Linz récupérer mon carton que j’avais fait envoyer depuis la France aux frais de l’entreprise (un des avantages du VIE), et qui avait été déposé dans un point relais ultra loin de chez moi. C’est dans ce genre de situation que je suis très contente d’avoir des colocs cool qui peuvent m’aider. J’ai aussi récupéré un bureau nul qui traînait dans la chambre d’une de mes colocs, il est bancal et vraiment pas terrible mais il fera l’affaire, le temps que je me décide à en acheter un mieux. Et enfin j’ai acheté d’autres petits trucs : chaise de bureau d’occasion, petites étagères, tapis, rideau supplémentaire (je suis au rez-de-chaussée), poubelle… Le temps que je puisse récupérer tout ça en clic & collect dans le magasin de meubles tout proche de chez moi, et je serai bien. C’est important de se sentir bien dans l’endroit où on vit, je ne sais pas si je resterai un an dans cette coloc mais si je dois déménager je me débrouillerai. J’ai besoin d’un cocon où je me sens chez moi, surtout que je me sens toujours étrangère dans cette ville et que je n’ai pas encore tout saisi du fonctionnement et des habitudes de la coloc.

D’un point de vue administratif, je n’ai rien à faire en termes d’assurance santé (avec mon assurance privée du VIE, je ne dépends ni de la sécu française, ni du système de santé autrichien), j’ai transmis mes coordonnées à Business France et voilà. J’ai aussi fait mon Anmeldung (inscription) au Bürgerservice (sorte de mairie annexe où on peut faire ses démarches administratives) pour signaler que j’ai emménagé à Linz. C’est une démarche obligatoire en Autriche, normalement c’est à faire dans les 3 jours suivant l’arrivée dans le pays, je l’ai faite au bout de presque deux semaines mais ça n’a pas posé problème. Au passage, on se plaint des horaires des administrations en France mais ici c’est pas beaucoup mieux : le Bürgerservice est ouvert du lundi au vendredi de 8h à 12h. Super pour ceux qui travaillent, du coup je suis arrivée en entreprise une heure plus tard ce jour-là. A leur décharge, les horaires sont réduits avec le covid. Les seuls trucs qui me restent à faire, c’est l’inscription au registre des français installés à l’étranger auprès du consulat (j’aurai déjà dû le faire d’ailleurs), une deuxième Anmeldung spécifique pour les gens qui viennent de l’étranger à faire sous trois mois, et prendre un numéro de téléphone local.

Et du coup, comment ça va ?

Au moment où j’écris la fin de cette article, ça va vraiment bien. Globalement je suis très satisfaite de mon installation et de mes débuts ici. J’aime bien conceptualiser les choses (est-ce que ce serait pas pour ça que j’ai fait des études d’ingénieur ?) et là, je considère que je suis sortie de la phase 1 de mon expatriation. Je m’explique.

La phase 1, c’est ce que j’appelle la rupture. Je n’ai pas eu de choc culturel en arrivant, j’ai déjà habité 5 mois en Allemagne et l’Autriche ça ressemble quand-même pas mal. Je dis rupture par rapport à mon quotidien d’avant-départ : d’un coup, tout est différent, je dois parler une autre langue, dans une nouvelle ville, avec des nouvelles personnes. Je commence à travailler après 5 mois sans emploi. J’ai besoin de m’acheter plein de trucs parce que je n’ai que 2 valises (ce qui est à la fois peu et déjà pas mal). D’où une certaine rupture, le jour où je suis montée dans le train me paraît déjà tellement loin… J’ai caractérisé cette phase comme le moment où tout est nouveau, tout est une aventure, on arrive avec zéro repères et on a tout à construire. Ça paraît cool comme ça, mais en fait il faut vraiment que cela ne dure pas trop longtemps. Parce que tout est une épreuve, que ça use, que je prenais très peu de temps pour moi, pour me reposer. Je ne sentais pas la fatigue aussi avec l’adrénaline du fait que tout était nouveau, alors que pourtant rien que pour parler avec mes colocs il me faut un gros effort. Donc oui la 1ere phase est ultra excitante et aussi très gratifiante (vous avez déjà poussé des cris de joie intérieurement en voyant des carottes à acheter en vrac ?) mais il ne faut pas qu’elle soit trop longue.

Là, avec le niveau de confort matériel que j’ai acquis, le fait que si je me sens toujours étrangère ici j’ai quand-même construit des repères et des habitudes, que je me fais doucement au rythme du travail, qu’en plus tout se passe très bien avec mes collègues et mes colocs, que je prends du temps pour me poser et que je vais passer un weekend sans devoir courir à travers la ville pour m’acheter un vélo, tout est réuni pour dire que je suis sortie de la phase 1. « Et la suite maintenant c’est quoi ? », je vous entends penser d’ici. Et bien je sais pas encore, je conceptualise au fur et à mesure, m’en demandez pas trop. Mais je pense que la suite, ce sera la phase 2 (ouah elle sait compter trop forte !), où je serai toujours dans l’émerveillement et la découverte mais de façon plus saine et plus posée, où je construirai mes habitudes et mes relations. C’est mon gros challenge désormais, me faire des amis. L’autre gros challenge qui va avec, c’est l’allemand. Je l’ai déjà évoqué, parler allemand me demande un sacré effort, et autant parler à une personne ça va, autant participer à une conversation c’est vraiment très compliqué, et très frustrant de ne pas comprendre les blagues etc.

Une de mes collègues m’a déjà demandé si j’avais le mal du pays. La réponse est non, c’est beaucoup trop tôt, et puis ce n’est pas ma première expérience à l’étranger. Peut-être que ce sera pour la phase 3 ? L’avenir nous le dira. Pour le moment je profite du fait que tout se passe bien même si tout est assez intense, et la suite on verra bien !

Emilie

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