L'appel du large

Les aventures d'une petite bretonne expatriée en Autriche

Aventure en train, épisode 1 : Pregarten

Il y a une idée qui me trottait dans la tête depuis un bon moment : aller à la gare, et monter dans le premier train qui part. Je m’explique. J’ai une carte de train qui me permet de voyager de façon illimitée sur tout le réseau de la compagnie nationale publique, ÖBB. Alors mon idée, c’était de profiter de cette opportunité pour prendre le train au hasard, sans planifier quoi que ce soit, et voir où ça me mène. En ce weekend prolongé de Pâques, où j’avais 4 jours de libres (le lundi est férié, et mes chefs m’ont donné mon vendredi), je me suis dit que c’était l’occasion idéale de me lancer dans ce projet.

Il y a eu plusieurs facteurs qui m’ont menée à ça. Déjà, je sens que j’ai tendance à me faire une montagne de trucs qui ne sont pas importants, ou à sur-planifier quand je vais quelque part. Sauf quand je pars avec des gens, où là je fais entièrement confiance aux autres pour trouver les coins sympas à voir (ça avait souvent été le cas pendant mon semestre erasmus à Hambourg), ou alors je dis oui direct à des plans même si les conditions optimales ne sont pas remplies (du genre quand je suis allée skier avec presque pas de matériel, sans savoir vraiment où on allait, et de façon organisée la veille au soir pour le lendemain au matin, j’ai raconté ça ici). Mais quand je suis seule, j’ai du mal à juste lâcher prise et je sur-réfléchis à mes plans. J’ai aussi une tendance à vouloir « rentabiliser mon temps » au maximum, et donc je veux aller dans des endroits qui en valent vraiment la peine. Sauf que pour trouver quel endroit en vaut la peine et quel endroit non, je passe du temps chez moi sur google maps à checker les environs, ou à vérifier les temps de trajets, la localisation de la gare par rapport à tel endroit qui a l’air cool, bref vous avez compris l’idée. Même là, en partant en escapade volontairement non organisée, j’ai regardé la météo et les taux d’incidence du covid par canton. Paradoxal, parce que pour le coup traîner sur internet comme ça, ça ne rentabilise pas du tout mon temps. Alors oui, ça m’arrive aussi de me balader un peu au hasard hein. Mais c’est justement parce que quand je le fais, j’aime bien, que j’ai envie de pousser le truc au niveau supérieur.

Alors le samedi du weekend de Pâques, j’ai décidé de mettre ce plan à exécution. Alors attention, j’ai pas pris exactement le premier train. Je me suis fixée trois limites :

  1. Ne pas traverser de frontière (parce que l’aventure c’est bien sympa mais j’ai pas envie de faire de quarantaine)
  2. Ne pas aller vers Vienne / en Niederösterreich, régions alors en lockdown pour cause de taux d’incidence élevés
  3. Ne pas prendre le Westbahn, la compagnie de train privée, même si ma carte y est aussi valide. J’ai décidé ça parce que quand je le prends pour aller travailler, les contrôleurs me demandent toujours quelle est ma destination, et là je n’avais pas envie de devoir répondre à cette question puisque je ne connaissais pas ma destination.

J’ai ajouté une autre règle : ne pas utiliser mon téléphone. Je m’explique. Je trouve que j’utilise trop mon téléphone, et que ça relève souvent plus du fomo (pour « fear of missing out ») que du réel besoin. Le fomo, c’est la peur de passer à côté de quelque chose / de louper quelque chose. C’est ce qui me pousse à checker mon téléphone régulièrement (on sait jamais, peut-être que j’ai reçu un message ?), à ouvrir mon application d’informations par réflexe (on sait jamais, peut-être qu’il s’est passé quelque chose de vraiment important ?), vous voyez le truc. J’étends un peu la définition à la peur de passer à côté d’un endroit « à voir absolument » sans le savoir quand je voyage (ce qui nous ramène à ce que je racontais plus haut). En tout cas, j’ai tendance à l’utiliser par réflexe, ou pour m’occuper l’esprit / les mains. Bref, j’ai décidé de prendre mon téléphone avec moi, mais de ne l’utiliser que pour quelques raisons bien définies :

  1. Pour écouter de la musique dans le train
  2. Pour utiliser un dictionnaire si c’est vraiment nécessaire
  3. Pour checker les horaires de train pour rentrer
  4. Si je suis vraiment totalement perdue, pour retrouver le chemin de la gare

Voilà, maintenant que tout ça est posé, je suis allée à la gare, et j’ai pris le premier train, sans regarder les horaires en avance. Ce qui était plutôt cool, parce que du coup j’ai pris le temps de me préparer tranquillement, n’ayant pas du tout de pression d’horaire à respecter. Je suis arrivée à la gare vers 11h30, le premier train qui correspondait à mes critères partait 5 minutes plus tard vers Pregarten, et je suis montée dedans. Il s’est avéré c’était un train régional, qui faisait plein d’arrêts. J’ai hésité entre descendre en cours de route ou rester jusqu’au terminus, mais au final j’ai attendu le terminus, à 40 minutes environ de Linz. Et c’est ainsi que je me suis retrouvée à Pregarten, sans avoir aucune idée de s’il y avait vraiment des choses à y faire, et si oui, quoi. J’ai vite fait vérifié la fréquence des trains pour rentrer, j’ai vu qu’il y en avait toutes les heures, alors j’ai mis mon téléphone en mode « ne pas déranger » (pour ne pas voir des éventuelles notifications si je devais le consulter pour une des raisons énoncées plus haut), et je l’ai mis au fond de mon sac. Direction l’aventure.

L’autre petit truc que j’ai fait, c’est consulter mon guide touristique sur l’Autriche pour voir s’il y avait un truc sur Pregarten. Réponse : non. Ok. En sortant de la gare, j’ai vu des petits panneaux, dont un qui indiquait un endroit situé à 5 minutes à pied : Bruckmühle. Je me suis dit que ça devait être un truc cool, et j’ai suivi la direction. J’ai pas trouvé Bruckmühle (je suis tombée dessus plus tard, c’est un lieu culturel qui fait salle de concert / d’expositions / école de musique), mais il y avait une rivière, c’était joli, je l’ai longée un peu, et je suis tombée sur un nouveau panneau qui faisait la liste des chemins de randonnée de la ville. Bingo. En plus le panneau était vraiment bien fait, pour chaque sentier (il y en a 9), il y avait une photo du point remarquable, le kilométrage + la durée, et le pourcentage en nature / en ville. J’en ai ciblé 3, j’étais déjà passée devant des petites pancartes indiquant la voie à suivre pour deux de ces chemins, alors j’y suis retournée et j’ai pris la direction du sentier n°2. Un sentier en nature, qui suivait la rivière, puis qui montait sur une colline, pour arriver à une chapelle. C’était vraiment sympa.

Je me suis baladée tranquillement, j’ai pris mon temps, j’ai dû rester bien 10 minutes dans la chapelle pour me poser. Le fait de ne pas utiliser mon téléphone faisait que je ne sentais pas du tout de pression extérieure, j’avais aucune idée de quelle heure il était, alors je me laissais juste porter par ce que j’avais envie de faire, prendre des photos, m’asseoir, m’écarter un peu du sentier… Après la chapelle, le sentier allait sur la place principale de la ville. J’en ai profité pour m’acheter à manger (j’avais emmené juste une barre de céréales avec moi, plus une bouteille d’eau), il s’est avéré que le seul truc ouvert sur la place c’était un « salon de glaces », en gros un café où on peut acheter des gâteaux et des glaces (les autrichiens sont fan de glaces), donc j’ai pris un Zucchinikuchen, ou gâteau à la courgette. Bon, il était aussi au chocolat avec un beau glaçage, donc ça avait l’air appétissant, et c’était bon. Je me suis baladée un peu, je suis allée sur la place de l’église, et là re bingo, de nouveau un panneau explicatif des chemins de rando, plus détaillé et avec une carte. J’étais encore motivée pour marcher, alors j’ai choisi un autre sentier, indiqué pour durer une heure et demie, et je suis repartie.

Il se trouve que Pregarten, petite bourgade de 5000 habitants environ, est localisée dans le Mühlviertel, région géographique qui regroupe les 4 cantons (Bezirk en allemand) de la région Haute-Autriche situés au nord du Danube. Pour simplifier, c’est toute la zone à l’ouest de l’Autriche située entre le Danube et la frontière avec l’Allemagne. Linz en fait partiellement partie d’ailleurs, les quartiers d’Urfahr et Pöstlingberg sont dans Mühlviertel. C’est globalement une région de campagne, avec un paysage vallonné, fait de petites collines (enfin elle peuvent monter jusqu’à 1300m d’altitude, mais c’est pas les Alpes quoi), de forêts, de champs. D’ailleurs Mühlviertel signifie « le quartier des moulins », même si j’ai pas vu de moulins à Pregarten, mais je pense que c’est un bon indicateur du fait que c’est une région plutôt agricole. C’est un endroit plutôt sympa pour randonner, faire du vélo, du ski en hiver, mais pas non plus très touristique. Enfin bon, une pandémie mondiale n’est pas le meilleur moment pour juger de si un endroit attire beaucoup de touristes ou non. Bref.

En tout cas, j’ai vraiment aimé m’y balader. Se retrouver dans un cadre totalement différent de la ville mais pourtant accessible très facilement depuis Linz était plutôt cool. Pour la fin de l’histoire, après ma 2e rando j’étais fatiguée, je voulais rentrer donc je suis allée vers la gare sans avoir besoin de gps, j’avais fait attention au chemin à l’aller. Quand j’y suis arrivée, j’ai découvert que le train suivant vers Linz partait environ 5 minutes plus tard. Alors que je n’avais pas du tout vériféié en amont et que je ne savais pas quelle heure il était avant d’arriver à la gare. Le hasard fait bien les choses, comme on dit !

Expérience très positive donc ! Clairement je me suis retrouvée dans un endroit dans lequel je ne serai probablement jamais allée autrement, si j’avais planifié mon escapade. Et pourtant, j’y ai trouvé des choses à faire, j’ai vu tous les trucs remarquables à voir (en même temps il n’y en avait pas beaucoup), ça m’a fait un bon break en-dehors de la ville et le fait de ne pas utiliser mon téléphone ne m’a pas dérangée. C’est cool de voir un environnement différent, aller dans un village « authentique » m’a permis de découvrir un peu la campagne autrichienne, des trucs tout bêtes du style comment sont les maisons, de voir que les gens se disent bonjour dans la rue, ce genre de choses. Et qu’on y trouve plein de terrains de tennis en terre battue. Non parce que j’en ai vu trois à Pregarten, dont un dans un petit hameau d’une vingtaine de maisons. Faudra qu’on m’explique ça un jour.

Mais que fait ce terrain de tennis en terre battue à Pregartsdorf ?

Bref, pas du tout déçue de cette aventure au hasard du train, je renouvellerai très probablement cela !

Emilie

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